Perdre la vue, c'est une appréhension pour cette ex prof d'arts plastiques qui préside aujourd'hui l'association Valentin-Haüy de Saint-Claude.
« Les stalles, elles me collent à la peau ! On me les ressert à toutes les sauces ! ».
Andrée Renon fait mine de s'emporter.
En réalité les recherches qu'elle a menées avec l'abbé Pierre Lacroix suite à l'incendie de la cathédrale de Saint-Claude en 1983 constituent à ses yeux « le travail d'une vie. Jamais on aurait imaginé que nos travaux déboucheraient sur la reconstitution à l'identique des stalles sud parties en fumée ! Cela nous a pris 10 ans sans loisirs ni repos de l'esprit. »
Pour comprendre la portée d'un tel investissement, il faut saisir le personnage. « Être professeur, c'est un engagement à vie. Travailler pour permettre aux enfants sanclaudiens de découvrir cet élément inestimable de leur patrimoine, ça me dépassait. »
Et, pour que le patrimoine établisse réellement les liens de filiation entre présent et passé, pour qu'il fasse sens, il faut encore qu'il soit donné à voir. Or pour Andrée qui se dit « visuelle à 200 % », le regard aura été un outil de travail et son mode d'accès privilégié au monde.
Avec l'âge et la perspective de pouvoir perdre la vue, l'inquiétude la gagne.
Elle se rapproche de l'association Valentin-Haüy de Saint-Claude dont elle prend la présidence en 1999. « C'est fou ce que perdre la vue est handicapant. Ne serait-ce que pour s'habiller correctement, pour faire des démarches administratives ou pour se déplacer. On apporte aide au quotidien, chaleur humaine, on organise des activités pour recréer une vie sociale d'autant plus nécessaire que nos membres sont souvent isolés et défavorisés. En plus pour être membre, il n'y a rien à payer. Malgré cela il reste des mal-voyants qui ne nous connaissent pas. Que c'est dommage ! ».
Andrée a découvert un monde qui la touche, elle s'est trouvée une nouvelle mission.
Dans les groupes auxquels elle fait visiter la cathédrale bénévolement depuis 20 ans, les non-voyants se font plus nombreux : « La seule fois que quelqu'un a vu que les sculpteurs des stalles sud et nord n'étaient par les mêmes, c'était un aveugle. »
C'est fou ce que les non-voyants parviennent à voir.
Source : http://www.leprogres.fr
Un modeste coup de chapeau à Andrée Renon, qui a été mon professeur d'arts plastiques pendant quelques années...
