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Article du jeudi 21 février 2008
Le comté, bien plus qu'un fromage...
Une étude universitaire montre que l'aire d'appellation du comté s'étend sur 2 300 hectares et pèse 7 600 emplois directs en Franche-Comté. Ce qui fait du premier fromage AOC de France un poids lourd économique
Claude Vermot-Desroches, président du CIGC (comité interprofessionnel) estime que les chiffres de Pascal Bérion, maître de conférence à l'université de Franche-Comté, peuvent se situer en deçà de la réalité : « Je pense que les 7 600 personnes ne représentent que le domaine de la production. Il y a sur l'aire d'appellation presque 3 000 exploitations avec deux à quatre personnes. Il y a aussi 170 fromageries employant de une à trois personnes et une vingtaine d'affineurs dont certains ont entre 10 et 70 employés. On compte qu'une exploitation induit 6 à 8 emplois liés à l'agriculture » Qu'importent les chiffres, l'essentiel, c'est le poids de la filière. Le comté, c'est 51 000 tonnes de fromage produit chaque année avec, depuis 20 ans, une augmentation de 1 000 tonnes annuelles, le tout dans 170 ateliers. Autrement dit, la spécificité du comté c'est de faire vivre les gens sur leur territoire. Imaginons la même production en emmental (260 000 tonnes par an), elle pourrait se faire quasiment dans une seule unité hyper moderne telle qu'il en existe dans l'ouest de la France avec une cinquantaine de personnes. En Franche-Comté, c'est cinq à dix fois plus sur 2 300 km2
Occupation de l'espace, proximité de la production, mais aussi image artisanale. Quand on vend du comté, on vend un massif, une culture, des paysages : c'est l'autre versant économique du produit. La filière, qui a créé les routes du comté, qui construit des fruitières pédagogiques, qui multiplie la communication autour du « bien manger », qui met en scène tous les prix ramenés chaque année du salon de l'agriculture, l'a bien compris. Aux Rousses, le fort transformé en caves d'affinage est en lien direct avec la coopérative, tout ça sous le label station. Avec le tourisme, il faudrait là encore comptabiliser tous les emplois induits.
Mais, comme le répète Claude Vermot-Desroches, il ne sera plus possible d'augmenter la production de 1 000 tonnes par an. L'enjeu, ce n'est plus le marché hexagonal, mais bien l'export avec de nouveaux produits pour l'apéritif ou la cuisine au quotidien. Le risque, c'est que les groupes industriels s'emparent du marché, mais c'est le prix à payer. D'autant qu'à l'heure actuelle l'export appartient surtout aux entreprises régionales.
Personne ne peut lire l'avenir du comté. Ce qui est certain, c'est que la filière a toujours vécu dans l'insécurité (surproduction, concurrence), une insécurité qui a amené les gens à se battre pour survivre. Jusqu'à maintenant, c'est un pari gagné.
Armand Spicher
aspicher@leprogres.fr
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Repères
> 964
exploitations en AOC comté dans le Jura, soit 26,7 %
> 91 801
hectares utilisés en AOC lait à comté, soit 51,8 % de la surface totale
> 51 000
tonnes de comté produites par an
> 2 300
la surface en km2 de l'aire d'appellation du comté
> 43,2 %
de la main d'oeuvre totale des exploitations travaille en AOC lait à comté
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Les enjeux pour demain
Que sera le comté dans dix ans ? La filière ne peut pas répondre à cette question.
Par contre, elle s'est fixé des enjeux D'abord, conforter son originalité. Le comté doit rester un produit de terroir avec ses fruitières et ses 25 km de collecte. Ensuite, répondre aux souhaits du consommateur avec un cahier des charges draconien.
Enfin, gérer les volumes en limitant la production à l'hectare. L'autre levier, c'est la recherche : sur les matières grasses animales, sur l'autonomie en protéines, sur le type de cultures.
Mais le comté demain, c'est aussi le développement durable.
La maîtrise des intrants ou comment faire de la meilleure herbe plutôt que d'importer des tourteaux à base d'OGM, le lancement de réflexions sur le bilan carbone, la diminution des transports de lait, l'accompagnement des initiatives sur les chaudières à bois, le recyclage des déchets, la production elle-même, le séchage
Il reste tellement de choses à inventer
A.S.
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«La filière n'est pas délocalisable»
« La filière comté a mis en place un mode de discussion de la modernisation, elle fait des essais et voit si elle peut accepter les changements générés. Exemple : les robots de traite. Elle ne s'impose pas la seule régulation qui peut être dictée par la loi du marché. Cette attitude a des conséquences : pendant que la production de comté augmentait de 14 000 tonnes, le prix du lait a continué d'augmenter, cette hausse a été possible grâce à l'organisation de la production. Autre cas, en 2007 le prix du lait a augmenté globalement en France de 8 %, mais la hausse n'a été que de 3 % en Franche-Comté. C'est la force des appellations de maintenir des prix stables en limitant les éventuelles hausses, mais aussi en évitant les dépréciations liées aux rythmes du marché.
La filière comté a un atout, elle n'est pas délocalisable comme l'a été l'emmental. Son avenir dépendra de la capacité de l'interprofession à la diriger. Tant que des hommes se passionneront, elle durera. »
Le comté, bien plus qu'un fromage...
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Pour info, l'ensemble des éléments évoqués dans cet article du Progrès est consultable sur le site du Comté : http://www.comte.com
D.
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