Thierry39 a écrit :LE PAYS
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Article du samedi 21 février 2009
Agriculture : les montbéliardes soufflent les 120 bougies de la race au salon de Paris
Thierry Hückel, descendant de Joseph Graber, avec la plaque de premier prix du concours de l’exposition universelle en 1900. Photo Jean Becker
La montbéliarde aurait pu très bien s’appeler l’alsacienne, puisque les anabaptistes chassés d’abord de Suisse puis d’Alsace à cause de leur religion, en 1871 se sont réfugiés dans le pays de Montbéliard. Et c’est en reconnaissance à cette terre d’asile que Joseph Graber donna ce nom de race montbéliarde.
COUTHENANS
Thierry Hückel, descendant direct de Joseph Graber, arrière-arrière-petits fils de l’agriculteur anabaptiste, a accumulé des tonnes de documentation dans la ferme familiale à Couthenans (Haute-Saône). Là ou au XIXe siècle est née la montbéliarde.
Premier concours en 1872 à Langres
En 1750 une famille d’anabaptistes louait la ferme de Couthenans. Son descendant, Thierry Hückel, qui habite toujours la ferme raconte : « Jean Graber et Jean Riche ont été invités par le prince de Montbéliard dans son château. Quand ils arrivèrent, le prince leur a dit que sa femme voulait avoir douze vaches toutes semblables, venant de Suisse. Ils n’osèrent pas refuser et allèrent en Suisse où ils trouvèrent onze vaches tachetées blanc et noir. Mais ils ne trouvèrent pas une douzième donnant satisfaction. Ils en achetèrent une blanche tachetée de rouge. Elle était beaucoup mieux charpentée que celles tachetées de noir et la ramenèrent avec les autres pour le prince. Quelques jours plus tard, le prince leur demanda quelle récompense ils désiraient. Il leur offrit une ferme en propriété à chacun, mais Jean Riche refusa, alléguant que si une nouvelle période de persécution revenait à l’endroit des anabaptistes, ils seraient tentés d’abandonner leur foi, car ils risqueraient d’être trop attachés à ces biens terrestres. Il leur donna alors un bon salaire en argent pour leur travail. C’est de cette bête blanche et rouge qu’est issue la race montbéliarde. »
Les Graber étaient de bons éleveurs, et par des croisements avec des vaches locales et des simmental suisses, ils ont développé cette nouvelle race. « Au début, il désignait ses vaches sous le nom de race alsacienne. Mais quand l’Alsace est devenue allemande en 1870, Joseph Graber (1840-1923) a décidé de les appeler montbéliardes », précise Thierry Hückel.
Joseph Graber était un coureur de concours, il remportait toutes les premières places ou presque. Il présenta sous le nom de montbéliarde pour la première fois en 1872 au concours agricole de Langres.
Un peu plus tard, un descendant de Joseph Graber gagne le grand prix d’élevage de la race à l’exposition universelle de Paris en 1900. Et déjà, à cette époque, la montbéliarde avait des qualités : une bonne aptitude au travail. « On appelait les bœufs de montbéliarde, le cheval du pauvre », reconnaît Thierry Hückel. La deuxième qualité était l’aptitude bouchère et, enfin, la montbéliarde a toujours produit beaucoup de lait.
Ses qualités depuis cette date n’ont cessé d’être améliorées pour en faire la deuxième race de France. Pour Thierry Hückel, à l’époque, la montbéliarde a été créée pour répondre aux besoins du moment, et non pour la gloire de lancer une nouvelle race. À Couthenans, les médailles et trophées témoignent encore de ces concours d’antan.
Jean Becker
1 386 000
Le chiffre
On recense 1 386 000 animaux de la race montbéliarde en France, dont 657 356 vaches, 525 000 génisses (vaches qui n’ont pas encore vêlé) et 185 200 mâles. Près de 4 000 bêtes sont exportées chaque année. Depuis une dizaine d’années, on observe une augmentation du cheptel de l’ordre de + 0,4 % par an, la montbéliarde prenant ainsi le pas sur d’autres races bovines en France. Il y a 5 ans, la montbéliarde est devenue la deuxième race laitière en France. Ses atouts économiques séduisent de nouvelles contrées, principalement la Pas-de-Calais (+ 20,6%), la Picardie (+ 14%) et la Basse-Normandie (+4,4%).
Ces vaches produisent en moyenne dix tonnes de lait par an et permettent de fabriquer cinq tonnes de fromages AOC de Franche-Comté ans l’année. Notamment du comté.
Deuxième race laitière de France depuis cinq ans
Il y a cinq ans, la montbéliarde est devenue la deuxième race laitière en France. Jean-Marc Vacelet, directeur de l’organisme de sélection de la race montbéliarde, explique ce succès.
«De plus en plus d’agriculteurs en zone de polycultures-élevage ont de moins en moins de temps pour s’occuper de leurs animaux. La montbéliarde est une vache robuste et rarement malade, facile à traire et qui demande moins d’attention que d’autres races spécialisées. Ses qualités fonctionnelles se traduisent par moins d’infections de la mamelle, moins de boiteries ».
Une vache robuste
« Elle est aussi plus facile à reproduire car, contrairement à d’autres races, son comportement permet de détecter aisément ses périodes de chaleurs. Dès que l’éleveur s’en aperçoit, il peut la faire inséminer 18 heures plus tard avec de bonnes chances de fécondation. Ainsi, une vache montbéliarde moyenne donne un veau par an, et est conforme au modèle de production suivant : 305 jours de production et 60 jours de repos avant la prochaine naissance. Une montbéliarde peut facilement faire 10 lactations dans sa carrière, c’est-à-dire dix veaux. Cela se traduit, par rapport aux autres races comme la prim’holstein (vache noire et blanche), ou la normande, par quatre fois plus de vaches âgées dans les troupeaux.
Depuis la mise en place des quotas laitiers en 1985, l’évolution la plus significative est celle de la quantité de lait produite, avec plus de 1950 kg jusqu’en 2007, soit plus de 6,5 kg par vache et par jour de traite. Pour la seule transition 2006-2007, cela représente 220 kg de lait en plus par vache et par lactation. Au cours des différentes phases de sélection, nous avons trouvé l’équilibre entre production de lait, qualités fonctionnelles et aptitude bouchère. Même si une montbéliarde produit un peu moins, elle coûte moins cher, elle a plus de veaux et ces derniers sont vendus beaucoup plus chers qu’une autre race. L’agriculteur s’y retrouve donc au final. »
Dimanche sera attribué le titre de championne de France
Qui va succéder en 2009 à « Utile », championne de France adulte appartenant à Mickael Millet de La Marre dans le Jura. Photo Jean Becker
A l’occasion du salon de l’agriculture qui ouvre ses portes aujourd’hui samedi au grand public, se déroule le concours général agricole de la race montbéliarde. Une sélection très sévère qui consacre la championne de France.
C’est demain dimanche au salon de l’agriculture de Paris que va se dérouler le concours général de la race montbéliarde. Au total 34 vaches seront en compétition, car il s’agit d’une réelle compétition dotée en plus d’un défilé de mode. Car il faut que la vache soit la plus belle mais qu’elle corresponde aussi aux critères et au modèle de la race.
Dès cinq heures du matin, le jour du concours, les éleveurs, qui bien souvent ont dormi avec elle à même la paille pour les détresser, bichonnent leurs préférées pour les présenter dans leur plus belle robe au concours général, véritable championnat de France de la race montbéliarde.
Leur pelage est lustré à l’huile de vison et recouvert de paillettes scintillantes. Sous les projecteurs, elles vont évoluer avant une foule de spectateurs venus assister à de défilé de mode peu commun.
Durant plus d’une heure, les éleveurs en pantalon noir, chemise blanche, effigie de montbéliarde dans le dos, cravate ocre aux couleurs de l’organisme de sélection, vont présenter leur star devant les juges, intransigeants qui commentent en direct ses traits physiques et de caractère. De même que ses performances. Demain, c’est le grand jour !
Un organisme de sélection de la race montbéliarde
L’union de promotion de la race montbéliarde (Upra) a été remplacée par l’Organisation de sélection de la race montbéliarde depuis la loi modifiée de décembre 2006 qui redéfinit les missions de fonctionnement de cette structure.
Ce nouvel organisme a reçu l’agrément du ministère de l’Agriculture.
C’est d’ailleurs à la demande du ministère qu’est intervenue cette réforme du dispositif génétique français, afin d’introduire plus d’homogénéité entre les organismes de sélection en France. Depuis 2008, les bureaux de l’Organisme de sélection de la race montbéliarde sont installés à Roulans, dans le Doubs, où sont regroupés la coopérative d’élevage et d’insémination animale, la Coopex montbéliarde, Franche-Comté embryon, l’Établissement départemental de l’élevage, le syndicat de contrôle laitier et son laboratoire d’analyses, ainsi que la structure informatique qui centralise toutes les données de l’élevage régional et les données nationales de la race montbéliarde.