LES DEPECHES LE PROGRES
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Article du dimanche 20 janvier 2008
Gros plan sur l'église Saint-Bénigne de Pontarlier
Sous sa rudesse apparente, la sous-préfecture du haut Doubs recèle bien des charmes, dont ceux de l'étonnante église Saint-Bénigne et des vitraux de Manessier
Sitôt franchie la porte Saint-Pierre (ah ! l'aperçu sur les pentes du Larmont au-dessus de la rue de la République !), on tombe généralement amoureux de Pontarlier, une déroutante petite cité qui n'aime rien tant que de cultiver ses paradoxes : son climat rigoureux et la chaleur de son accueil, sa quiétude au quotidien et sa vitalité commerciale
Rares sont les Francs-Comtois qui n'ont jamais franchi les fossés du château de Joux, ou poussé la porte du musée municipal de Pontarlier, qui contient (entre autres trésors patrimoniaux) l'emblématique « musée de l'absinthe » L'église paroissiale brasse moins de visiteurs, lesquels se contentent généralement de jeter un coup d'oeil au passage à la belle tour blonde de Saint-Bénigne Jusqu'au jour où l'on se décide à passer sous son clocher-porche Et là surprise ! Bien sûr, on avait vaguement entendu parler des vitraux modernes d'Alfred Manessier, dont l'installation (en 1975) avait un peu défrayé la chronique Rien de comparable à la réaction des Parisiens devant les colonnes Buren, le centre Beaubourg ou la pyramide du Louvre (le Pontissalien est plus mesuré), mais tout de même Démonter des vitraux du XIXesiècle, même s'ils présentaient peu d'intérêt, pour installer ces immenses fresques abstraites et colorées
Un jeu de couleurs
et de lumière admirable
Aujourd'hui, la polémique est oubliée, et c'est même avec une fierté bien compréhensible que les bénévoles de l'association des Amis de l'Orgue pilotent les visiteurs dans l'édifice et les éclairent sur la symbolique des vitraux Pour peu que le soleil soit de la partie, il faut bien avouer que le jeu des couleurs et de la lumière est admirable, qui avait fait dire à l'artiste lui-même : « La joie éclate de partout, comme l'explosion d'une danse » C'est en fait une symphonie pascale qu'Alfred Manessier a voulu réaliser (« avec la vie, la mort, la résurrection »), dont l'abstraction exige un minimum d'explications, mais qui dégage indiscutablement une forte spiritualité, bien au-delà de la simple réussite décorative
Quant à l'église elle-même, dont les principaux éléments remontent essentiellement au XVIIesiècle, elle sort grandie de cet heureux mélange des époques et des styles qui se poursuit jusqu'au choeur, où les orgues classées de Claude-François Saumet voisinent avec un autel moderne signé Irène Sack Avec ses effets « chaud-froid », l'église Saint-Bénigne n'est donc pas le moindre des paradoxes de la petite cité de Pontarlier, une attachante « ville à la campagne » à (re)découvrir de toute urgence
Constance Rameaux