La semaine glaciale n'est pas vraiment propice à l'activité des grenouilles, mais à Torpes, chez les Cudey, l'optimisme reste de mise. Cette famille voue une véritable passion pour la production de grenouilles. "J'ai commencé en 1976 en creusant un simple trou d'eau" lance Rémy, le père aujourd'hui en retraite. Son fils Nicolas, par ailleur pêcheur professionnel, a repris le flambeau. Il produit près de 100 000 grenouilles par an qu'il transforme en laboratoire, l'un des rares à ête spécialisé dans ce domaine et agréé par la DSV. Que de chemin parcouru voici 35 ans.
Désormais, la production se réalise sur plusieurs sites et les producteurs connaissent de mieux en mieux les caractéristiques de ces batraciens. Nicolas témoigne : "dès que les températures remontent autour des 8-10°C, les grenouilles viennent pondre dans les étangs, là où elles sont nées ; une fois la ponte des oeufs réalisée et fécondée par le mâle, les grenouilles repartent dans le milieu naturel, jusque dans un rayon de 2 à 3km de l'étang, pour y passer le reste de l'année". On comprend donc l'importance de la qualité du milieu naturel proche de l'étang ; la simple présence des routes met en danger les batraciens, l'idéal étant de disposer de prairies naturelles et de forêts à proximité des lieux de ponte.
Mais produire des cuisses de grenouilles ne se limite pas à les piéger dans une nasse et à les préparer pour obtenir des cuisses prêtes à cuire. Il s'agit bien d'un travail de longue haleine. Les oeufs obtenus sont disposés dans des étangs dédiés où ils sont protégés des éventuels prédateurs. Le producteur veille à ce que les tétards ne manquent pas de nourriture. Les étangs principaux sont vidés et nettoyés chaque année avant d'être remis en eau. C'est une approche globale de la production qui permet aux fins gourmets de déguster un produit frais, local, sans remettre en cause la pérénité de l'espèce, un véritable exemple de consommation durable.
Une production encadrée
Du côté de la Direction Départementale des Territoires (DDT), on appuie le développement de la filière en collaboration avec la Chambre d'Agriculture et l'Onema. Mais l'objectif reste néanmoins de préserver la ressource en étant vigilant sur les prélèvements. "L'heure n'est plus à autoriser la création d'étangs, la priorité est d'inciter les propriétaires à régulariser leurs étangs en les déclarant, la démarche est simple et gratuite" précise Daniel Conche, technicien en charge des milieux aquatiques. Une fois ces démarches accomplies, une autorisation de prélèvement est donnée au propriétaire : il s'agit d'un quota de production ; ce dernier est fixé en s'appuyant sur l'avis des agents de l'Onema. Le propriétaire devra alors tenir un registre où il notifiera ses captures ainsi que leurs destinations, un processus de traçabilité en quelque sorte. Daniel Conche précise que le département compte à l'heure actuelle plus de 70 producteurs déclarés, pour une autorisation de prélèvement de 700 000 grenouilles.
Par Michel Messin, le 13/03/2010.
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