La signification de "jugum"

jost
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Re: La signification de "jugum"

Message par jost »

jost a écrit :Que signifie exactement le terme Joux comme dans le col de Joux Plane ?
Joux est un toponyme assez fréquent dans une zone qui s'étend du Jura aux Savoies. Il désigne une région boisée (voir le beau pléonasme "la Forêt de Joux" dans le Jura). Nous connaissons bien "Joux-Plane" ou "Joux Verte"
Les références concernant la signification de ce toponyme sont nombreuses à commencer par "Glossaire des termes dialectaux " publié par l'IGN où on peut lire : " Joux: nom féminin, montagne boisée le plus souvent en résineux"
Autre ouvrage indiquant la signification de joux : "Noms de lieux de Suisse Romande, Savoie et environs" où on peut lire : Joux (nom féminin) Ancien mot local désignant une forêt de haute futaie des régions montagneuses. Variantes du vieux français : jeur, jore, joure, jure, etc.., du latin médiéval : juria, jurim, joria(...) gaulois : jor, juris : "hauteur boisée"
…/ »
jost a écrit :"....une montagne boisée mais Joux Plane est constitué d'herbages ?"
Un toponyme a la vie dure. La forêt ainsi désignée a peut être disparu depuis longtemps au gré des défrichements mais le nom du lieu est resté.

C'est même toute la richesse de la toponymie, elle nous éclaire sur les anciens usages de tel ou tel lieu car ils sont restés dans la mémoire des noms.
René Poty …/ »
J’ai trouvé la réponse, faite à René Poty, elle nous vient d’un membre de son association.

« …/La réponse de George Rossini
Je viens de lire l'intéressant article de René sur l'origine de la toponymie et l'origine des noms des cols, parmi lesquels je constate une inexactitude, il s'agit du toponyme Col de la Joux Verte (74-1765).
Le mot Joux est d'origine latine, très utilisé dans l'idiome savoyard pour définir Joug pour la langue française, Joch pour la langue allemande et Giogo pour la langue italienne, quelques exemples :

- Col de la Joux Plane (74-1713)
- Stilfser Joch 2758 m, deuxième nom en allemand du Giogo ou Passo dello Stelvio
- Giogo della Bala 2129 m , ces deux col se situant en Lombardie (Italie).

Il y a divers passages géographiques qui portent le nom Joux comme La Joux dans le Chablais et La Joux dans L'Ain qui ne sont pas répertoriés dans le catalogue des Cols de France.

Il y a aussi La Forclaz toponyme toujours d'origine latine, Forca en italien qui sont synonymes de fourche.
Ou Pertuis synonyme de Porte, Porta en italien, Port en espagnol, etc.
A propos de Forca, et des très nombreux col qui ont pourtant les vraies caractéristiques d'un passage géographique (dépression entre deux sommités, mettant en communication deux vallées hydrographiques), non répertoriés dans le catalogue, en consultant la nouvelle carte IGN TOP 25 - 3741 OT.
Vallée du Vésubie (Alpes Maritimes) il y a un passage géographique qui porte le nom de Forca de l'Authion 1986 m, entre la sommité 2078 m et le Mille Fourches ( !!! ) 2042 m, situé sur la route formant le circuit de l'Authion en partant du Col de Turini 1604 m. En observant un peu plus en bas il y a un autre passage géographique qui devrait s'appeler Forca de Cabanes Vieilles à 1779 m entre le sommet de Mille Forche 2042 m et le sommet de Vaiercaout 1816 m.
Bien sur il faut respecter le règlement, qui stipule qu'on doit retenir seulement que les cols portant officiellement ce nom ou matérialisé par un panneau au sommet. Et pourtant Joux, Forclaz, Forca, Pertuis, etc. sont synonymes de passage géographiques.

Bientôt je vais répondre sur l'imbroglio des cols franco-italiens.

Georges Rossini
…/ »

Vous avez pu le constater plus haut, pour expliquer JOUX par HAUTEUR, on se réfère au gaulois jor, juris : "hauteur boisée" (...) Alors que les Joux, tout comme les jougs, les portes et les fourches sont des passages.
Ces toponymes s’inscrivent bien dans nos paysages.
Aucune définition ou explication émanant du latin JUGUM ne donne HAUTEUR, seuls les dictionnaires de traduction avancent cela, parce qu’ils se réfèrent à des traductions dont les auteurs n’ont pas poussé l’analyse de JUGUM plus avant.
Les traductions de JUGUM par « hauteur », « crêtes », « ligne de crêtes », « collines allongées » sont fausses et, pas conséquent il en est de même pour celles des « dictionnaires bilingues, voire multilingues, qui donnent les traductions des mots d'une langue vers une ou plusieurs langues étrangères. »


Il serait bon que l'on se rapelle de cela dans le forum sur ALESIA
"La vérité est une ligne tracée entre les erreurs."
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Re: La signification de "jugum"

Message par jost »

Pour en terminer avec l’étude des mots qui évoquent les passages dans un paysage, je ne résiste pas à vous soumettre l’étude de Michel Brebisson. Elle concerne essentiellement le mot « COL ».
Je suis plein de respect devant tant de sérieux, tant de recherches, allant jusqu’à l’investigation. Je suis également admiratif devant ce « Souci » permanent d’aller au fond des choses, sur un seul mot, sur un seul sens. Les intervenants, et je pense à quelques-uns du forum ALESIA, devraient en prendre exemple. Mais dans tout les cas avoir du respect devant un tel travail. quand ils affirment « haut et fort » des vérités, sans en avoir fait l’étude au préalable, sans avoir essayer de comprendre le pourquoi du comment, relève d’une légèreté limite préjudiciable pour l’ « H »istoire.
Je note aussi l’objectivité et l’humilité en fin d’étude, où l’auteur souligne que tant de choses restent à faire pour restituer la « M »émoire.
Pour conclure, rien, absolument rien, ne permet de prétendre que JUGUM puisse se traduire par « colline allongée » ou « chaîne de montagne ». Il faut se rendre à l’évidence, sur ce mot-là, les traductions sont allées au plus court, elles n’ont pas envisagées que, et comme le souligne si justement Michel de Brédison, « pour un moderne un col est un point bas dans une chaîne de montagne, pour un Romain ou un Gallo-Romain, c'était au contraire le point le plus haut d'un itinéraire. » Cette façon de voir était probablement la même pour «JUGUM ».
COL : étymologie et définition

Étymologie

Col vient du latin collum dans le sens de cou. Ce mot col est attesté vers le XIèmeS en français, mais il ne sera utilisé dans son sens géographique qu'à partir du XVIIème S, remplaçant l'ancien français port. Cependant, il fut utilisé dès les XVème et XVIème S dans des sens tels que col de vessie, puis col d'un vase.

Port vient d'une racine indo-européenne per- <traverser> qui donnera en latin portus <passage>, attesté dès le XèmeS en ancien français (92 exemples pyrénéens dans le Chauvot).

Pas vient du latin pandere, passus, il est utilisé dès le XIèmeS dans le sens de passage, défilé (passeur au XIIème). Littré (sur 28 sens de pas) donne le sens de "passage étroit et difficile dans une montagne" avec une citation de Vaugelas pour le 13ème sens (11éme sens : passage, 12ème : pertuis, 15ème : seuil). D'après le Dictionnaire historique de la langue française, dès 1160-1174, pas désigne un passage difficile souvent qualifié par l'ancien adjectif mal (1176-1181), origine des malpas actuels ; remplacé (XIIIème S) par mauvais d'où les mauvais pas et les maupas actuels ; il s'étendra à la désignation de détroit (1530) ou de défilé (1559), valeurs vieillies, sauf en toponymie (par ex. : pas de Calais, pas de Suse).

Baisse vient du latin bassus qui donnera bassiare (lat.vulg.) puis baisser (français au XIèmeS) et enfin baisse (au XVIèmeS). Littré donne en 3ème sens (sur 4) "terrain affaissé", mais sans référence à la montagne. Depuis quand est-il utilisé pour désigner un col ? On en trouve, en effet, principalement dans les Alpes Maritimes (215 exemples dans le Chauvot) !

Brèche attesté en français en 1119, viendrait du haut allemand brecha <fracture> issu du francique breka <fracture, ouverture> (218 exemples dans le Chauvot).

Défilé (1643) est issu du latin filum <fil> donnant filare en bas latin (vers 1160) signifie alors passage encaissé (où l'on ne peut passer qu'à la file).

Détroit est issu, d'abord sous la forme destreit (1080) du latin districtus <empêché, enchaîné>. Le mot, d'abord adjectif, a qualifié un passage étroit resserré (les destreiz passages). Il garde ce sens jusqu'au XVIIèmeS où le sens moderne de bras de mer resserré s'impose.

Passage (1080) est dérivé du verbe passer (1050) issu du latin tardif passare <traverser> dérivé du latin passus. Il a d'abord désigné un défilé dans la montagne, un port; il en reste encore de très nombreux exemples (121 citations dans le Chauvot).


En fait, la plupart de nos termes, synonymes de col (1), ne doivent rien au français, ils sont issus des nombreux dialectes et patois de nos trois grands domaines romans (oïl, oc et franco-provençal) et bien sûr, également, de certaines de nos langues régionales (par exemple alsacien, basque, breton, catalan, corse, ...) et à ce titre, ils n'ont pas droit de cité dans nos dictionnaires classiques, mais guère plus dans ceux, spécialisés en géographie.


(1) une ou deux centaines suivant que l'on se réfère au glossaire établi à partir du "Chauvot" ou à celui que j'ai obtenu à partir de sources extérieures ( voir mon article "Comment appeler un col en France ?" RVA n°6 ).



Définition

Voici quelques exemples des définitions obtenues en consultant des dictionnaires classiques :

1 - Petit et Grand Robert : "Dépression formant passage entre deux sommets montagneux", voir brèche, défilé, détroit, gorge, pas, port. Si l'on se reporte à ces différents item, dont certains (défilé, détroit, gorge) n'évoquent plus du tout pour nous l'idée de col, nous avons un peu l'impression de tourner en rond : à brèche, aucune référence géographique ; à défilé, rien non plus, mais renvoi à couloir et passage qui, eux, évoquent bien l'idée de col ; à gorge, renvoi à cañon, col, couloir et porte ; à pas, qui nous est si familier, aucune référence géographique non plus; seul port bénéficie de la mention : "col des Pyrénées" et si l'on consulte à porte (introduit par gorge!) on trouvera enfin une définition géographique : "passage étroit dans une région montagneuse", ce qui ne correspond pas obligatoirement à la réalité (par ex., en Isère, le col de Porte - redondance - n'est pas précisément un passage étroit).

2 - Le Robert - Dictionnaire historique de la langue française : le sens imagé, col de montagne (depuis 1635), suivant la définition donnée par le petit et le grand Robert, a éliminé peu à peu les anciens termes port, pas (qui se disait d'un passage difficile) et détroit qui ont tous pris et gardé d'autres sens.

3 - Littré : (4ème définition sur 8) "Point d'une chaîne de montagne où le faîte, faisant une inflexion, offre un passage d'un versant à l'autre, entre les points d'attache de deux contre-forts".

4 - Larousse du XXème Siècle : "Partie déprimée d'une arête montagneuse permettant de passer d'un versant de la montagne à l'autre versant". Syn.: défilé, détroit, gorge, pas. Le pas y est défini comme signifiant passage difficile et pouvant avoir le sens de col ou de détroit. Dans un paragraphe "géographie" il est indiqué que la principale cause de formation des cols est l'action des torrents qui "creusant leur lit de plus en plus haut dans la montagne finissent par déterminer l'abaissement de la crête séparative" ! Ils déterminent aussi des cols d'amont situés sur la ligne de faîte entre deux vallées de direction opposée et des cols de flancs situés sur la ligne de faîte entre deux vallées plus ou moins parallèles. Tout ceci me semble pour le moins curieux, sinon hasardeux.

5 - Larousse : "Partie déprimée d'une crête montagneuse, utilisée comme passage".


Aucune de ces définitions ne paraît vraiment satisfaisante à un chasseur de cols qui a rencontré des situations tellement variées. La dernière, la plus courte et la plus simple d'ailleurs, me semble la moins mauvaise.

Voyons maintenant ce que disent les dictionnaires de géographie.

Première recherche (dictionnaire géographique de chez Hatier): "Quand une ligne de crête s'abaisse pour ensuite remonter, elle forme un col". Bien !

Seconde recherche (dictionnaire critique de la Documentation Française : les mots de la géographie) : "Point déprimé entre deux sommets, ensellement sur une crête, facilitant le passage". L'ensellement est défini, dans ce même ouvrage, comme un "creux assez ample dans le profil d'une crête, d'un relief allongé, à l'image du dos du cheval".

On trouve également dans ce dictionnaire les quelques précisions suivantes :


a) "Tout col est duel : en creux par rapport à la ligne de crête, en relief par rapport à la route, il sépare aussi bien deux monts que deux vallées ; en cheminant à pied sur les crêtes on descend vers les cols, par la route on les gravit". Voici une observation qui semble bien évidente et pourtant combien de fois ai-je reçu des lettres de cyclos se demandant s'ils avaient bien "franchi" tel ou tel col dans cette situation pourtant "évidente" et inévitable, ... sauf à franchir tous les cols en repartant de la vallée la plus proche (en admettant qu'il y ait toujours un sentier)!

b) "Les cols marquent parfois la traversée d'une frontière". Je pense qu'ici le terme frontière doit être pris dans un sens très général de limite de département, de canton, de commune, etc. et non pas seulement frontière d'état, situations, qu'en effet, l'on observe très fréquemment.

c) "Les cols se situent souvent dans des zones faibles du bâti structural (roches tendres, ligne de faille ou de broyage) ou sont abaissés par le recul des têtes de vallons". Données géomorphologiques plus convaincantes que l'action des torrents (à ne pas confondre avec l'action du ruissellement, tout à fait déterminante).

d) "Collet : petit col". Cette mention du terme collet, dans son acceptation géographique, est intéressante, car aucun des dictionnaires cités précédemment ne l'indiquait, alors que ce terme apparaît à 242 reprises dans le Chauvot ! Par contre, l'on ne trouve dans aucun dictionnaire l'utilisation de ce terme dans le sens de "colline", pourtant sans doute deux fois plus fréquent que dans celui de col pour de nombreuses régions telles que les Hautes Alpes et la Provence.


Pas (après celui de col, terme le plus répandu : 905 exemples dans le Chauvot) ; passage (sixième terme le plus répandu : 121 exemples dans le Chauvot) ; passe (5 exemples dans le Chauvot, se dit en général en français d'un col très élevé et peu accessible) sont des synonymes de col, proches du pass anglais ou allemand et l'on remarque alors, que la fonction l'emporte sur la forme.

Quant à la centaine de termes supplémentaires qui figurent dans notre Chauvot, ils sont totalement ignorés et a fortiori la seconde centaine que j'ai découverte dans les guides, glossaires, etc. ou auprès des habitants de nos régions montagneuses; termes locaux superbement ignorés des topographes "d'oïl et de goguette" qui ont établi nos cartes en les parsemant de mentions tautologiques.
Au terme de cet examen, on peut conclure qu'un col se caractérise donc par :

a) un passage préférentiel entre deux zones (val, vallon, vallée, etc.),

b) une structure de dimension très variable (allant du point au creux assez ample).


Peut-on aller plus loin ? Serait-il intéressant de se lancer dans une typologie des cols comme avait tenté de le faire Ch. Guitton dans le n° 10 de la revue des 100 cols, déterminant et décrivant des cols de ligne de crête, de flanc, de fond de synclinal, de combes, d'entre deux cirques, de jointure d'arêtes ainsi que des brèches de crêtes et des brèches d'arêtes et tout ceci pour conclure que sa liste pouvait encore se poursuivre, mais que tout cela ne servait pas à grand chose !

La difficulté éprouvée à définir ce qu'est un col, réside sans doute dans la diversité des logiques en présence. Il semble que l'on puisse en définir quatre :

1) la logique populaire, pour laquelle la notion de col est inséparable, non seulement d'une forme de relief caractéristique (affaissement sur une crête formant encolure), mais aussi, et surtout, de la présence d'une voie de communication plus ou moins aisée (c'est à dire de la route carrossable au simple sentier) introduisant une double notion historique et géographique,

2) la logique scientifique des géographes pour qui un col existe dès lors qu'il obéit aux critères de taxonomie des formes du relief définis par la discipline (dépression sur une crête, formant passage, qu'il soit inscrit ou non dans l'histoire locale),

3) la logique des nomenclateurs (les premiers, ceux des cartes militaires) qui, tout en s'appuyant sur le témoignage populaire, privilégièrent le point de vue national pour la dénomination ; ils étaient, malheureusement, souvent ignorants des parlers locaux et plus ou moins bien formés aux définitions scientifiques,

4) la logique des "rectificateurs" (les membres des sociétés alpines ou pyrénéistes), bons connaisseurs de la montagne, et quelquefois des dialectes ; prenant souvent le parti des autochtones, restituant alors assez fidèlement les appellatifs et les noms propres populaires ; cependant, dans un souci de donner une apparence de scientificité à leur pratique sportive, ils eurent parfois tendance à instituer leurs propres conceptions et choix de dénominations, pratique poussée jusqu'à l'absurde lorsqu'elle accorde le statut de col à des dépressions infranchissables par le commun des mortels.


De ce concert improvisé est née une certaine confusion des genres, variable suivant les régions. Pour l'essentiel, l'arbitraire des cartes porte bien sur le choix du déterminant (col, pas, brèche, collet, passade, etc., ou rien du tout) et le problème concerne souvent moins la montagne proprement dite, que les régions de piémonts où le choix de nommer "col de ..." l'un ou l'autre des passages historiques entre deux localités relève parfois de l'arbitraire le plus pur. Pourquoi celui-ci ? Et pas son voisin aussi "col" que lui ? D'où les frustrations exprimées par de nombreux membres de la Confrérie des 100 Cols. Les cartes sont, à l'évidence, lacunaires, particulièrement pour tout ce qui concerne les cols secondaires ou les passages tombés en désuétude.

Il serait sans doute difficile, mais peut-être pas sans intérêt, dans une perspective de restauration du patrimoine, de se lancer dans un inventaire plus exhaustif des passages de moyenne et basse montagne, c'est-à-dire dans une cartographie qui se donnerait pour objectif, sur la base de documentations historiques et géographiques (cartes anciennes, cadastres actuels ou anciens, guides locaux, chroniques locales, etc.), de restituer les cols oubliés.

Dernière remarque qui participe autant de l'étymologie que de la définition. Alors que pour un moderne un col est un point bas dans une chaîne de montagne, pour un Romain ou un Gallo-Romain, c'était au contraire le point le plus haut d'un itinéraire. Cette remarque, illustrée par des exemples tels que : Gavrus mons sur la table de Peutinger (col de Cabre actuel), Mont Iseran sur la carte de Cassini (col de l'Iseran) ou Mont Sion (col de Sion), point le plus haut de la route Genève-Annecy, justifie l'introduction de mont (et mons) dans le glossaire où figurent déjà leurs équivalents tels que le basque "mendi" ou le gascon "cap".

Ce sujet mériterait sans doute bien d'autres considérations, de nombreux commentaires seraient nécessaires, s'il vous intéresse n'hésitez donc pas à me faire part de vos réflexions ou de vos interrogations, je m'efforcerai d'y répondre.


Août 1997 - Michel de Brébisson
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Re: La signification de "jugum"

Message par jost »

"Col de Joux
11027 SAINT VINCENT (AO)



Description du parcours :
Le col de Joux (1640 mètres d'altitude) est un col boisé qui relie Saint-Vincent à la commune de Brusson et représente donc un autre passage possible que celui de la route qui monte de Verrès pour rejoindre la Val d'Ayas.
Le parcours longe des hameaux typiques et traverse des bois charmants ; il offre des points de vue exceptionnels sur la vallée centrale et sur le Val d'Ayas.
Le mot Joux viendrait d'un terme prélatin signifiant hauteur boisée, mais selon certains, il faudrait le rattacher au latin Jugum signifiant saillie, et donc col..."

Donc un passage pour les Italiens (Tiré du site du Région du Val d'Aoste)
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Re: La signification de "jugum"

Message par jost »

A Gergovie JUGUM interpelle également !

http://www.gergovie.fr/htmfr/pdf/N_55.PDF
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Message par jost »

César, Commentaires sur la Guerre civile, Livre II
iugum
A propos du promontoire d’Utique, notre ami Obélix me faisait remarquer que jugum n’était pas forcément un passage et qu’un promontoire au-dessus de la mer était dénommé ainsi par César.


[2,24] Curio Marcium Uticam nauibus praemittit; ipse eodem cum exercitu proficiscitur biduique iter progressus ad flumen Bagradam peruenit. Ibi C- Caninium Rebilum legatum cum legionibus reliquit; ipse cum equitatu antecedit ad castra exploranda Cornelia, quod is locus peridoneus castris habebatur. Id autem est iugum directum eminens in mare, utraque ex parte praeruptum atque asperum, sed tamen paulo leniore fastigio ab ea parte, quae ad Uticam uergit. Abest directo itinere ab Utica paulo amplius passuum milibus. Sed hoc itinere est fons, quo mare succedit longius, lateque is locus restagnat; quem si qui uitare uoluerit, sex milium circuitu in oppidum peruenit.

2,24] Curion envoie Marcius à Utique avec les vaisseaux, et le suit en même temps par terre avec l'armée; et, après deux jours de marche, il arrive à la rivière de Bagrada où il laisse le lieutenant C. Caninius Rébilus avec ses légions. Pour lui il prend les devants avec la cavalerie afin d'aller reconnaître le camp Cornélius, parce que l'on disait ce poste très avantageux. C'est un promontoire qui domine la mer, rude et escarpé des deux côtés, mais ayant cependant une pente un peu plus douce du côté d'Utique. En droite ligne, il n'est éloigné d'Utique que d'un peu plus de mille pas; mais dans ce chemin est une source qui communique à la mer et rend cet endroit fort marécageux. Si l'on veut l'éviter, il faut prendre un détour de six milles pour arriver à la ville.

Le texte césarien est intéressant à plus d’un titre.
D’une part la localisation du site d’Utique est attestée et d’autre part certains vocables sont aussi utilisés pour la description du site de l’Alésia des Mandoubiens.

„Id autem est iugum directum eminens in mare,“
« C'est un promontoire qui domine la mer ». Ici l’Université de Louvain traduit « jugum » par promontoire.

Tout d’abord, les paysages changent en 2000 ans…


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Mais, y regarder de plus près :

1- Un paysage en forme de joug de bœuf se dégage.
2- Un passage existe entre les deux sommets.

Le joug y est donc bien réel.


Image

De plus le texte impose :

Qu’à l’époque, Utique ainsi soit en bord de mer.

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Re: La signification de "jugum"

Message par jost »

Le texte impose aussi
Que le joug soit « utraque ex parte praeruptum atque asperum » « rude et escarpé des deux côtés » voilà qui conforterait « eminens in mare » (saillant) sur la mer.
A noter au passage :
que "eminens" signifie saillant, et que César n'utilise pas ce mot pour l'oppidum d'Alésia, pour lequel il écrit "edito loco" lieu parfaitement élevé.
Que César parle de parties (parte) et non côtés

Image
Modifié en dernier par jost le dim. 02 mai 2010, 12:07, modifié 3 fois.
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Re: La signification de "jugum"

Message par jost »

Le texte nous dit aussi :

Qu’une pente douce, en faîtage (fastigio) soit tournée (vergit) vers Utique. « Vergo », a donné en français converger (des plusieurs endroits rallier un point) ici c’est l’inverse nous partons d’un point pour plusieurs descentes possibles vers Utique.
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Re: La signification de "jugum"

Message par jost »

Encore d'après le texte il faut :

- Que le trajet direct, depuis le camp soit d’environ 1.3 km
- Qu’une autre route de 9 km soit possible

Image
Modifié en dernier par jost le dim. 02 mai 2010, 11:31, modifié 1 fois.
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Re: La signification de "jugum"

Message par jost »

Pour en finir, d'après le texte l'on doit avoir :
Sur cet l'itinéraire direct de 1.3 km une source ou une fontaine (fons) qui rende les lieux marécageux.

Image

La voici, 20 siècles plus tard : elle est toujours là.

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Et dire que certains affirment que César n'est pas fiable...
:hat:
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